Maire, Conseil municipal et vidéoprotection : qui décide de quoi ?
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A la suite d’un incident survenu le 3 février 2018 sur le territoire de la commune de Pont-Sainte-Maxence (divagation d’un cervidé), qui se situe dans le parc naturel régional » Oise-Pays de France « , lors d’une chasse à courre, le Maire de cette commune a, par un arrêté du 1er mars 2018, interdit, d’une part, la chasse à courre dans toute l’agglomération à proximité des secteurs urbanisés et dans un périmètre de 300 mètres aux abords des habitations, étendu à 400 mètres dans les quartiers de Terriers et de Fond Robin y compris dans les zones boisées, d’autre part, que les animaux chassés soient mis à mort dans toute l’agglomération et enfin, fait obligation aux veneurs et à leur équipage de ne pas franchir le domaine public routier communal lors de ces chasses.
N’ayant eu que partiellement gain de cause devant le Tribunal administratif d’Amiens, la requérante a interjeté appel du jugement n° 1801168 du 6 mars 2020, les 1ers Juges n’avaient annulé que l’interdiction faite aux veneurs et à leur équipage de franchir le domaine public routier communal lors des chasses à courre. Par un arrêt n° 20DA00793 du 25 mai 2021, la Cour administrative d’appel de Douai a rejeté la requête de la fédération départementale des chasseurs de l’Oise qui demandé l’annulation de l’arrêté du 1er mars 2018 du Maire de la commune de Pont-Sainte-Maxence règlementant la chasse à courre sur le territoire de la commune.
Chasse à courre : Police générale du Maire ou police spéciale de l’Etat ?
L’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose que » la police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment :
1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques […],
2° Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique ».
Cependant, le Cour considère que si la police de la chasse constitue une police spéciale relevant de la compétence de l’Etat, les dispositions législatives qui la régissent n’ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de priver le Maire de la possibilité d’user, afin de répondre à des circonstances locales, des pouvoirs de police générale qu’il tient de l’article L. 2212-2 du CGCT.
Il en résulte selon elle que le Maire de la commune de Pont-Sainte-Maxence était compétent pour réglementer la chasse à courre au titre de ses pouvoirs de police générale sur le territoire de la commune compte-tenu de l’incident survenu le 3 février 2018 lié à la divagation d’un cervidé lors d’une chasse à courre.
Chasse à courre : Compétence du Maire ou du directeur du parc naturel ?
L’article L. 331-10 du code de l’environnement dispose que » le directeur de l’établissement public du parc national exerce, dans le cœur du parc, les compétences attribuées au maire pour : 1° La police de la circulation et du stationnement prévue aux articles L. 2213-1 à L. 2213-6 du code général des collectivités territoriales, hors agglomération ».
La commune de Pont-Sainte-Maxence est située sur le territoire du parc naturel Oise-Pays de France, qui est un parc naturel régional et non un parc naturel national. Dès lors, la requérante n’était pas fondée à soutenir que seul le directeur du parc naturel » Oise-Pays de France » pouvait interdire le franchissement du domaine public routier communal pour les voies situées dans ce parc. De plus, il résulte des termes mêmes de l’article 1er de l’arrêté attaqué que les mesures d’interdiction prises ne trouvent à s’appliquer que dans les limites du territoire communal.
Chasse à courre et secteurs urbanisés
La Cour relève que l’arrêté du 1er mars 2018 interdit la chasse à courre dans toute l’agglomération à proximité des secteurs urbanisés et dans un périmètre de 300 mètres aux abords des habitations et de 400 mètres dans les quartiers de Terriers et de Fond Robin. Elle relève également que si ces zones concernent notamment la forêt d’Halatte, qui est une forêt domaniale appartenant à l’Etat et gérée par l’office national des forêts, il est constant qu’une partie de la forêt d’Hallatte se situe dans le périmètre du territoire communal.
Dès lors, et compte-tenu du fait que les pouvoirs de police du Maire s’exercent sur l’ensemble du territoire communal tant sur le domaine public que sur le domaine privé ainsi que sur les propriétés privées situées dans ce périmètre, le Maire n’a pas excédé son champ de compétence.
Chasse à courre, troubles à l’ordre public et interdiction proportionnée
Le Maire de la commune de Pont-Sainte-Maxence a interdit la chasse à courre dans toute l’agglomération à proximité des secteurs urbanisés et dans un périmètre de 300 mètres aux abords des habitations, périmètre étendu à 400 mètres dans les quartiers de Terriers et de Fond Robin en se fondant sur le fait que la pratique de cette chasse en forêt d’Halatte avait entraîné à plusieurs reprises des troubles à l’ordre public portant atteinte à la sécurité et à la tranquillité des habitants et de ce qu’un nouvel incident s’était produit le 3 février 2018 par l’emprunt, par un cervidé poursuivi par une meute de chiens, d’axes de circulation majeurs jusqu’au cœur de la ville dans des zones urbanisées denses.
De plus, cet incident survenu le 3 février 2018 faisait suite à d’autres incidents similaires survenus en 2016 et 2017 concernant la divagation de chiens de chasse dans l’agglomération et la survenue en janvier 2018 d’un accident de la circulation d’un véhicule automobile percuté par un chien de chasse à courre. La Cour relève que les précédents incidents avaient d’ailleurs amené le Maire de Pont-Sainte-Maxence à interdire, par un précédent arrêté du 2 mars 2016, la chasse à courre à proximité des secteurs urbanisés de la commune dans un périmètre de 200 mètres aux abords des habitations.
La Cour estime que dans ces conditions, la fédération départementale des chasseurs de l’Oise n’est pas fondée à soutenir que l’événement survenu le 3 février 2018 présentait un caractère exceptionnel et isolé, et ce d’autant plus que ce dernier événement, survenu un samedi, un jour d’affluence, a vu un cervidé poursuivi par une meute de chiens dans les rues du centre-ville de la commune et franchir deux axes de circulation majeurs avant de se réfugier dans l’une des rues derrière l’hôtel de ville à proximité de commerces. Cette intrusion a nécessité pendant plusieurs heures l’intervention de la gendarmerie et de la police municipale pour sécuriser la zone et l’injection à deux reprises à cet animal, difficile à maîtriser, d’un produit tranquillisant afin de pouvoir le capturer pour le relâcher dans la forêt.
Cet événement, qui a eu lieu dans des zones urbanisées denses de la commune et qui faisait suite à de précédents incidents de même nature, a porté atteinte à la sécurité et à la tranquillité publiques des habitants justifiant que des mesures d’interdiction soient prises par le maire dans le cadre des pouvoirs de police générale qu’il tient de l’article L.2212-2 du CGCT.
Dès lors, la Cour a jugé que les mesures prises n’ont pas le caractère d’une interdiction générale et absolue dès lors qu’elles ne portent que sur les parties urbanisées de la commune dans un périmètre de 300 mètres aux abords des habitations, étendu à 400 mètres dans les quartiers de Terriers et de Fond Robin et qu’elles ne constituent pas davantage une mesure disproportionnée par rapport à leur objet, eu égard aux atteintes déjà portées, en l’espèce, à la sécurité et à la tranquillité des habitants de la commune.
La requête de la fédération départementale des chasseurs de l’Oise a donc été rejetée.
Crédits photographie : Roger Mechan