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31 mai 2021Le Conseil d’Etat fait le tri entre la taxe et la redevance d’enlèvement des ordures ménagères
Par une décision n° 442583 rendue le 12 mars 2021, le Conseil d’Etat a fait œuvre de pédagogie en distinguant précisément la taxe d’enlèvement des ordures ménagères et la redevance d’enlèvement des ordures ménagères et les conditions dans lesquelles elles sont ou non exigibles.
Les faits soumis au Juge administratif
La société anonyme Natixis Lease Immo, devenue BPCE Lease Immo, a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 2017 pour deux immeubles situés respectivement aux 17 et 21 rue de Chazelles à Paris (17ème arrondissement) qu’elle loue à un établissement de santé. Par un jugement n° 1911036, 1911054 du 12 juin 2020, ce Tribunal a fait droit à ces demandes. Par un pourvoi enregistré le 7 août 2020 le Ministre de l’économie, des finances et de la relance demande au Conseil d’Etat d’annuler ce jugement.
Taxe ou redevance ?
Aux termes des articles 1520 et 1521 du code général des impôts, les communes qui assurent au moins la collecte des déchets des ménages peuvent instituer une taxe destinée à pourvoir aux dépenses du service. Cette taxe porte sur toutes les propriétés soumises à la taxe foncière sur les propriétés bâties ou qui en sont temporairement exonérées ainsi que sur les logements des fonctionnaires ou employés civils et militaires visés à l’article 1523.
Le code général des impôts précise que les conseils municipaux déterminent annuellement les cas où les locaux à usage industriel ou commercial peuvent être exonérés de la taxe. La liste des établissements exonérés est affichée à la porte de la mairie. Sauf délibération contraire des communes ou des organes délibérants de leurs groupements, les locaux situés dans la partie de la commune où ne fonctionne pas le service d’enlèvement des ordures sont exonérés de la taxe.
Par ailleurs, en vertu de l’article L. 2333-76 du code général des collectivités territoriales, les communes peuvent, alternativement, instituer une redevance d’enlèvement des ordures ménagères calculée en fonction du service rendu lorsqu’elles assurent au moins la collecte des déchets de ménage.
Le Conseil d’Etat considère qu’il résulte de ces dispositions que la taxe d’enlèvement des ordures ménagères prévue par le code général des impôts a, contrairement à la redevance du même nom susceptible d’être instituée en vertu du code général des collectivités territoriales, le caractère d’une imposition de toute nature et non celui d’une redevance pour services rendus. Elles sont donc juridiquement très différentes.
Le Conseil d’Etat précise que la circonstance que le propriétaire d’un immeuble passible de la taxe foncière sur les propriétés bâties situé dans une zone desservie par le service éliminerait lui-même les déchets ménagers produits par cet immeuble, sans recourir à l’utilisation du service, n’est pas, par elle-même, de nature à justifier une absence d’assujettissement à cette taxe.
Le Conseil d’Etat annule le jugement du 12 juin 2020 pour erreur de droit
Le Conseil d’Etat relève que pour juger que l’immeuble en litige devait être regardé comme situé dans une partie de la commune où le service d’enlèvement des ordures ne fonctionne pas, au sens et pour l’application des dispositions précitées du 4 du III de l’article 1521 du code général des impôts, et faire, par suite, droit aux demandes de la société Natixis Lease Immo, le Tribunal administratif de Paris s’est fondé sur ce qu’il résultait de la réglementation sanitaire applicable que la collecte et l’élimination des déchets des établissements hospitaliers étaient assurées par ces établissements eux-mêmes et ne relevaient pas du service de collecte et de traitement des déchets ménagers assuré par la collectivité. Le Conseil d’Etat en déduit qu’en statuant ainsi le Tribunal administratif a commis une erreur de droit.
En l’espèce, les locaux à raison desquels les impositions litigieuses ont été établies sont situés en bordure d’une voie publique sur laquelle circulent les véhicules du service municipal de collecte des ordures ménagères. La société Natixis Lease Immo n’ayant ni établi ni même allégué un éloignement particulier entre le point de passage de ces véhicules et l’entrée des locaux en cause, elle ne saurait prétendre à être exonérée de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères sur le fondement des dispositions du 4 du III de l’article 1521 du code général des impôts, quand bien même l’établissement de santé qu’est son locataire ne ferait pas usage du service compte tenu des contraintes que fait peser sur lui la réglementation sanitaire applicable. Le Conseil d’Etat a donc annulé le jugement du Tribunal administratif et a rejeté les demandes de la Société Natixis Lease Immo.
Cette décision souligne le fait que la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, qui est une imposition et non une redevance pour services rendus, est exigible quand bien même le propriétaire éliminerait lui-même les déchets ménagers ou serait soumis à une obligation règlementaire d’avoir à collecter ou à éliminer lui-même les déchets de son immeuble.
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Source photographique : auteur, Chabe01, Licence CC BY-SA 4.0