Extension d’une construction existante
20 décembre 2022Médiateur ou rapporteur public : le Conseil d’Etat confirme la décision du Juge d’appel
27 janvier 2023Production de vins mousseux de qualité et IGP Lorraine
Par une décision n° 459207 du 23 décembre 2022, le Conseil d’Etat a validé l’homologation du cahier des charges de l’IGP Lorraine relatif à la production de vins mousseux de qualité.
Par une requête du 7 décembre 2021, la Fédération nationale des producteurs et élaborateurs de Crémant a demandé l’annulation de l’arrêté interministériel du 12 octobre 2021 homologuant le cahier des charges de l’indication géographique protégée (IGP) « Lorraine ».
Dans le cadre de cette affaire, comme dans les nombreux contentieux engagés par elle ces dernières années contre les mousseux de qualité de différentes indications géographiques protégées, elle soutenait que :
- l’arrêté était entaché d’une erreur d’appréciation au motif que le cahier des charges n’établissait pas l’antériorité de la production de vins mousseux de qualité dans la zone géographique délimitée par le cahier des charges de l’IGP Lorraine à la date de l’arrêté
- les auteurs de l’arrêté ont commis une erreur d’appréciation en estimant que le cahier des charges de l’indication géographique « Lorraine » considère établi le lien géographique et l’interaction causale entre la zone géographique et la qualité, la réputation ou d’autres caractéristiques des vins mousseux.
La requête de la Fédération nationale des producteurs et élaborateurs de Crémant a été rejetée.
IGP, vin et cahier des charges : quelle règlementation ?
L’article 93 du règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles définit l’indication géographique protégée comme « une indication renvoyant à une région, à un lieu déterminé ou, dans des cas exceptionnels, à un pays, qui sert à désigner un produit […] possédant une qualité, une réputation ou d’autres caractéristiques particulières attribuables à cette origine géographique ».
L’article 94 du même règlement précise que « le cahier des charges permet aux parties intéressées de vérifier le respect des conditions de production associées à l’appellation d’origine ou à l’indication géographique. Il comporte au minimum les éléments suivants :
- pour un vin bénéficiant d’une indication géographique, ses principales caractéristiques analytiques ainsi qu’une évaluation ou une indication de ses caractéristiques organoleptiques
- les éléments qui corroborent le lien visé […] à l’article 93».
Le Conseil d’Etat déduit de ces dispositions que l’homologation d’un cahier des charges d’une IGP, qui n’est pas une simple indication de provenance géographique, ne peut légalement intervenir que si ce cahier précise les éléments qui permettent d’attribuer à une origine géographique déterminée une qualité, une réputation ou d’autres caractéristiques particulières du produit qui fait l’objet de l’indication et met en lumière de manière circonstanciée le lien géographique et l’interaction causale entre la zone géographique et la qualité, la réputation ou d’autres caractéristiques du produit.
Il découle en outre nécessairement de ces mêmes dispositions qu’elles ne permettent de reconnaître un lien avec une origine géographique que pour une production existante, attestée dans la zone géographique à la date de l’homologation et depuis un temps suffisant pour établir ce lien.
Enfin, celui-ci doit être établi pour un produit déterminé et ne peut donc procéder d’une analogie avec un autre produit, même voisin.
Antériorité de la production de mousseux de qualité et IGP Lorraine :
Au cas d’espèce, et au vu de l’ensemble des éléments produits par les parties pendant l’instruction de cette affaire, le Conseil d’Etat a considéré qu’il ressort des éléments figurant au cahier des charges, tels qu’étayés par les pièces du dossier, que la production de vins mousseux de qualité dans la zone de l’IGP Lorraine, qui avait quasiment disparu après la Première guerre mondiale, s’est développée notamment à partir des années 1980-1990 et consolidée depuis le début du XXIème siècle.
Dès lors, le moyen soulevé par la Fédération requérante tiré de ce que l’antériorité de la production de vins mousseux de qualité dans la zone géographique considérée ne serait pas établie a été écarté par le Juge administratif.
Lien avec l’origine géographique de la production de mousseux de qualité de l’IGP Lorraine :
S’agissant du second critère, le Conseil d’Etat relève que le cahier des charges de l’IGP Lorraine comporte des développements sur les caractéristiques organoleptiques spécifiques aux vins mousseux concernés qui résultent :
- des spécificités de la zone géographique et de ses conditions climatiques,
- de l’usage de cépages majoritairement issus de la région et adaptés à ce terroir,
- des techniques employées par les producteurs de la région, notamment leur savoir-faire en matière de seconde fermentation alcoolique en bouteille.
Ainsi, le Juge administratif considère que l’existence d’un lien avec l’origine géographique est établie par le cahier des charges de l’IGP Lorraine pour les vins mousseux de qualité blancs, rosés et rouges.
Dès lors, le moyen tiré de ce que l’homologation du cahier des charges par l’arrêté attaqué procèderait d’une erreur d’appréciation en l’absence d’un tel lien a été écarté le Conseil d’Etat.
Après avoir exercé un contrôle entier de la légalité de l’arrêté homologuant le cahier des charges de l’IGP Lorraine, le Conseil d’Etat a donc rejeté la requête de la Fédération Nationale des producteurs et élaborateurs de Crémants.
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Sources photographiques :
Couverture : © Christian Amet
Intérieur : Ji-Elle