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Par une décision n° 464419 du 11 octobre 2023, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur une mesure de radiation des cadres prise dans le cadre d’une procédure d’abandon de poste.
Par un décret du 6 mai 2022, le Président de la République a radié des cadres pour abandon de poste un ingénieur en chef des ponts, des eaux et des forêts. Celui-ci a saisi le Conseil d’Etat d’une requête en annulation qui a été accueillie.
Procédure d’abandon de poste
Le requérant a été affecté le 14 janvier 2015 dans une direction d’un ministère. Le 6 décembre 2021, la secrétaire générale de ce ministère, estimant qu’il se trouvait en situation d’absence non justifiée depuis le 11 juin 2020, l’a mis en demeure de reprendre son service dans un délai de huit jours, sous peine de s’exposer à l’engagement d’une procédure de radiation pour abandon de poste. La mise en demeure a été réitérée par un nouveau courrier du 21 janvier 2022 du chef de service des ressources humaines. Par décret du 6 mai 2022, le Président de la République a radié l’intéressé des cadres pour abandon de poste.
Dans la décision, le Conseil d’Etat rappelle qu’une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l’agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai qu’il appartient à l’administration de fixer. Une telle mise en demeure doit prendre la forme d’un document écrit, notifié à l’intéressé et l’informant du risque qu’il encourt d’une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable.
De la sorte, la procédure paraît avoir été formellement respectée mais le Conseil d’Etat a été amené à sa prononcer sur la situation et l’affectation de l’intéressé pour exercer son contrôle.
Pas de poste, pas d’abandon de poste
Dans la seconde étape de son raisonnement, le Conseil d’Etat rappelle que, sous réserve de dispositions statutaires particulières, tout fonctionnaire en activité tient de son statut le droit de recevoir, dans un délai raisonnable, une affectation correspondant à son grade.
Dès lors, lorsqu’un agent n’a pas reçu une affectation correspondant à son grade, il ne peut être regardé comme ayant, faute d’avoir rejoint son poste ou repris son service, rompu de son fait le lien avec le service et ne peut dès lors faire l’objet d’une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste.
En l’espèce, l’intéressé exerçait les fonctions de responsable du contrôle de gestion au sein d’une mission qui a été supprimée en mars 2019 dans le cadre d’une réorganisation de la direction et n’a pas été affecté à l’entité qui a repris les missions de cette structure. De plus, malgré des échanges exploratoires sur la suite de son parcours professionnel avec sa hiérarchie, échanges restés sans suite, il n’a, par la suite, fait l’objet d’aucune affectation.
Dès lors, l’absence d’affectation de l’intéressé faisait obstacle à ce que puisse être légalement prononcée à son encontre une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste, peu importe la teneur des échanges sur les affectations envisagées intervenus entre l’intéressé et sa hiérarchie, à qui il appartenait en toute hypothèse de procéder à son affectation régulière.
L’intéressé était donc bien fondé à demander l’annulation du décret et à ce qu’il soit enjoint au ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire de procéder à sa réintégration en l’affectant sur un poste correspondant à son grade dans un délai de deux mois et de reconstituer sa carrière ainsi que ses droits à pension à compter de la date de son éviction illégale.