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22 juillet 2019Des précisions sur la règle de constructibilité limitée en droit public
La règle de constructibilité interdit en principe, en l’absence de plan local d’urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers ou de tout document d’urbanisme en tenant lieu, les constructions implantées en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune, c’est-à-dire des parties du territoire communal qui comportent déjà un nombre et une densité significatifs de constructions. Il s’ensuit que les constructions ne peuvent être autorisées en dehors de ces parties. Cette règle donne lieu à de nombreux contentieux, notamment en ce qui concerne les exceptions à cette règle prévues à l’article L. 111-1-2 I 1° du code de l’urbanisme.
Par une décision n° 419921 du 29 mai 2019 rendue à la requête du ministre de la Cohésion des territoires, le Conseil d’Etat a été amené à rappeler le cadre posé par la Loi, notamment en ce qui concerne les critères et les conditions permettant la délivrance de permis de construire dans ce cadre.
Le code de l’urbanisme prévoit au titre des exceptions à la règle de constructibilité limitée, d’une part, l’adaptation, le changement de destination, la réfection et l’extension des constructions existantes et, d’autre part, depuis la modification apportée par la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, la construction de bâtiments nouveaux à usage d’habitation à l’intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole et dans le respect des traditions architecturales locales.
Au titre de la première de ces deux exceptions, peuvent être autorisés des projets qui, eu égard à leur implantation par rapport aux constructions existantes et à leur ampleur limitée en proportion de ces constructions, peuvent être regardés comme ne procédant qu’à l’extension de ces constructions. Aucune disposition n’impose toutefois qu’une extension satisfaisant à ces critères doive en outre, pour pouvoir être autorisée, présenter un caractère mesuré. Il résulte, enfin, de cet article, éclairé par les travaux parlementaires ayant conduit à l’adoption de la loi du 25 mars 2009, que la condition tenant au respect des traditions architecturales locales, résultant de cette loi, ne s’applique pas à l’extension des constructions existantes, mais seulement à la construction de bâtiments nouveaux.
Au titre de la seconde exception, peut être autorisée la construction de bâtiments nouveaux à usage d’habitation, à la double condition qu’ils soient implantés à l’intérieur d’un périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole et qu’ils respectent les traditions architecturales locales. Le bénéfice de cette exception n’est pas réservé aux cas dans lesquels le périmètre constitué par les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole est clos, mais peut aussi valoir pour les cas où les bâtiments nouveaux sont implantés dans un espace entouré de bâtiments agricoles suffisamment rapprochés pour pouvoir être regardés comme délimitant, même sans clôture ou fermeture, un périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole.
En l’espèce, le Préfet de l’Orne avait refusé de délivrer un permis de construire pour la restauration et l’extension d’une habitation sur le territoire de la commune de Craménil, laquelle est dépourvue de plan local d’urbanisme ou de carte communale, au motif que le terrain était situé en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune et qu’en raison de l’accroissement de la surface d’origine, le projet ne pouvait être regardé comme une extension mesurée d’une construction existante. Le tribunal administratif de Caen puis la cour administrative d’appel de Nantes avaient annulé cette décision de refus pour excès de pouvoir.
Le Conseil d’Etat a confirmé cette analyse en relevant d’une part qu’en imposant que l’extension d’une construction existante, pour pouvoir être autorisée sur le fondement des dispositions précitées du 1° du I de l’article L. 111-1-2 du code de l’urbanisme, devait présenter un caractère mesuré, le Préfet avait opposé une condition non prévue par la loi. Il a jugé d’autre part que le projet de construction, s’il devait être regardé comme une construction nouvelle, était situé à l’intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole alors même que l’espace délimité par les constructions agricoles rapprochées qu’elle a prises en compte n’était pas clos.
Source photographique : Père Igor [CC BY-SA 3.0]