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5 novembre 2019Le droit européen, protecteur du temps de repos des personnels de la police nationale
Par une décision n° 409340 rendue le 24 juillet 2019, le Conseil d’État a annulé des dispositions du décret du 30 janvier 2017 portant dérogations aux garanties minimales de durée de travail et de repos applicables aux personnels de la police nationale qui étaient contraires au droit européen sur l’aménagement du temps de travail.
Le Syndicat des cadres de la sécurité intérieure a demandé l’annulation de certaines dispositions du décret n° 2017-109 du 30 janvier 2017 qui instaurait des périodes de référence dans lesquels étaient définie la durée du travail et de repos applicable aux personnels de la police nationale. Le ministre de l’intérieur avait ainsi décidé que « la durée du travail mesurée, pour chaque période de sept jours, heures supplémentaires comprises, ne peut excéder 48 heures en moyen sur une période d’un semestre de l’année civile » alors que la directive européenne 2003/88/CE du 4 novembre 2003 a imposé que la période de référence ne dépasse pas 4 mois par principe et 6 mois par exception pour les activités de garde, de surveillance et de permanence nécessaires à la protection des biens et des personnes, et à la continuité du service.
Procédant en deux temps, le Conseil d’État a d’abord saisi la Cour de Justice de l’Union Européenne d’une question préjudicielle aux fins de savoir si les dispositions de la directive doivent être interprétées comme imposant une période de référence glissante ou comme laissant aux États membres le choix de lui conférer un caractère glissant ou pas. Il a ensuite statué sur l’application en droit public interne et en droit de la fonction publique applicable aux personnels de la police nationale.
Que dit le droit européen ?
En réponse à la question préjudicielle, l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne du 11 avril 2019 a dit pour droit que les dispositions de la directive ne s’opposent pas à une réglementation nationale qui prévoit, aux fins du calcul de la durée moyenne hebdomadaire de travail, des périodes de référence qui commencent et se terminent à des dates calendaires fixes, pourvu que cette réglementation comporte des mécanismes permettant d’assurer que la durée moyenne maximale hebdomadaire de travail de quarante-huit heures est respectée au cours de chaque période de six mois à cheval sur deux périodes de référence fixes successives.
Au vu de cet arrêt, le Conseil d’État a alors statué sur la question spécifique à la durée du temps de travail et de repos des personnels de la police nationale.
Que dit le droit public interne pour la police nationale ?
Le Conseil d’État a eu à trancher la question de l’articulation entre « période fixe » et « période glissante » dans l’appréciation de la durée du temps de travail et de repos des personnels de la police nationale.
Il a ainsi jugé qu’il résulte de l’arrêt de la Cour que, dès lors que les autorités françaises ont fixé la durée moyenne maximale de travail des fonctionnaires actifs de la police nationale au plafond de 48 heures hebdomadaires prévu par l’article 6 de la directive et étendu à six mois la période de référence utilisée pour le calcul de cette moyenne, en application de ses articles 17 et 19, seule l’utilisation de périodes de référence glissantes permet de garantir que la durée moyenne maximale hebdomadaire de travail de 48 heures est respectée au cours de toute période de six mois.
Par voie de conséquence, il a jugé que les dispositions de l’article 1er du décret attaqué par le Syndicat des cadres de la sécurité intérieure doivent être annulées en tant qu’elles prévoient que la période de référence de six mois qu’elles définissent est une période fixe coïncidant avec un semestre de l’année civile.
Cette affaire illustre le fait que le droit européen est protecteur des agents de la fonction publique en matière de durée et d’aménagement du temps de travail, et notamment des personnels de la police nationale qui bénéficient désormais expressément des garanties du droit européen explicitées par la Cour de Justice de l’Union Européenne.
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Source photographie : Pablo Tupin-Noriega – Wikimedia France [CC BY-SA 4.0]